Le flamenco dans tous ses états - La Tribune

Le flamenco dans tous ses états

Spectacle de la compagnie catalane Ana-Ana à l’auditorium de la radio algérienne
(Edition de 09/05) Par Farida Belkhiri

La compagnie qui s’est produite à Alger grâce à l’Académie artistique du pays catalan et la Radio algérienne, donnera un deuxième concert demain à Oran.

Une sélection d’œuvres traditionnelles est au menu du spectacle de chant et danse flamenco que la compagnie catalane Ana-Ana a donné pour la première fois à Alger, lundi dernier à l’auditorium de la Radio algérienne.

Devant un public nombreux et curieux (entré sur invitation), la compagnie espagnole représentée par Antoine Fernandez, Christian Cormes, Antoine Gomez et la danseuse Isabel Gasquez, remonte le temps à l’ère des rites musicaux et chorégraphiques gitans (Tziganes) et andalous.

Le flamenco avec toute sa passion et sa douleur s’est exprimé dans cette soirée à travers un jeu de guitares mêlant la gaîté à la mélancolie, portées par les percussions du cajon dont le timbre variait en accord avec les guitares. Le cajon est un instrument inventé par les esclaves d’Amérique latine qui se joue en étant assis dessus ou bloqué à plat entre les jambes. Le cajon a la forme d’une caisse et sa plaque de frappe (devant) est plus fine que les autres côtés permettant une variation de frappes.

Cette fusion de sons est aussi accompagnée d’une voix puissante, lente, aux couleurs de l’Espagne. Langoureuse, cette voix masculine rappelle un peu par sa façon d’exécuter les différentes compositions le style de chant andalou. Selon certains spécialistes, le flamenco est né en Andalousie au XVIIe siècle, «C’est l’heureuse synthèse, lente et complexe, des cultures gitane, juive et andalouse», affirme-t-on.

Comme le chaabi chez nous, le flamenco est une musique populaire, le langage du petit peuple qui souffre de ses origines ou de sa situation sociale. Evidemment, d’autres influences musicales s’ajouteront à la composition de ce genre typiquement espagnol, laissées par les cultures et civilisations diverses qui ont traversé l’Espagne. Dans ce spectacle, la compagnie Ana-Ana ne se limite pas à l’exécution traditionnelle du flamenco. Elle introduit quelques morceaux «innovateurs» qui transparaissent dans la musique et le chant comme dans la danse.

La danse flamenco, selon la mine émerveillée qu’affiche le public à chacune des apparitions de la danseuse catalane, semble être le «passage» le plus apprécié du spectacle, Au milieu de la scène, Isabel Gasquez ’tourbillonne avec sa robe aux couleurs vives qui enfle et s’ouvre comme une fleur. De ses bras gracieux, elle exécute des mouvements précis, parfois chorégraphiques mais toujours impétueux. Un mélange de force et de sensualité se dégage du corps de la danseuse dont le port altier est exprimé par ce regard distant qui lui fait relever la tête pour regarder au loin ou la baisser vers le sol. Le coup gracile et le corps se tendent pour épouser le prochain phrasé et le traduire en mouvement de danse. Sa façon de lever ses jupons pour faciliter le jeu de ses pieds jouant des claquettes a quelque chose de troublant.

Du coup, l’austérité des planches et du décor de l’auditorium s’efface pour faire place à un monde chatoyant et mystérieux que le public découvre peut-être pour la première fois. Ce dernier se laisse emporter par le rythme, imitant les artistes dans leur façon de battre la mesure en frappant des mains et des pieds qui deviennent un autre «instrument» renforçant le reste des instruments et jouant d’une manière tout aussi «ardente» que la guitare ou le cajon. Notons enfin que la compagnie Ana-Ana qui devait se produire hier au bois des Arcades à Riadh el Feth, donnera un dernier concert demain à Oran.

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